Chapelle et culte de Notre-Dame de la Salette à Villers-sur-Semois

Chapelle dédiée à Notre-Dame de la Salette
Chapelle de la Salette

Elle est située à la sortie de Villers-sur-Semois, à gauche en allant vers Mortinsart.

Ce serait l'abbé Burtombois, prêtre belge ordonné en France, qui introduisit ce culte à Villers, où il fut curé entre 1820 et 1847.

A la Salette, près de Grenoble, la Vierge serait apparue à Mélanie et Maximin, deux petits bergers, en 1846.

La chapelle a été bâtie en 1946 sous le pastorat de l'abbé Léon Chenot, curé de Villers de 1930 à 1950.
Elle est la réplique exacte de la chapelle érigée sur les lieux de l'accident qui a coûté la vie à la reine Astrid, en 1935, à Kussnacht en Suisse.
Un pèlerinage est organisé à la chapelle le troisième dimanche de septembre.

Quelle est l'histoire de ces apparitions de la Vierge à la Salette ?

Les apparitions présumées de la Sainte Vierge à La Salette.
Village de la Salette

La Salette-Fallavaux est un village de France, dans l'Isère, au coeur des Alpes, à 70 km au sud de Grenoble, entre le massif du Beaumont et la vallée du Valgaudemar.
A près de 1800 mètres d'altitude, le site est difficile d'accès. Jusqu’à la moitié du XIXe siècle il était sauvage et méconnu. Seuls quelques bergers avec leurs troupeaux s’aventuraient sur les pentes du mont Gargas, culminant à 2208  mètres, pour profiter des alpages.

Le village de La Salette est petit et n'abrite que quelques dizaines d'habitants. Il peut être considéré comme un hameau de Corps, à quelques kilomètres plus au sud. A partir des maisons du village, pour atteindre le lieu de notre histoire, il faut arpenter des chemins étroits et parcourir d'immenses pâturages.

Mélanie et Maximin

C'est ce que font Mélanie et Maximin, deux enfants de Corps, le 19 septembre 1846 après-midi.

Pierre-Maximin Giraud a 11 ans et est le quatrième enfant d'une famille modeste. Il fut orphelin de sa mère peu après sa naissance et son père se remaria, mais Maximin resta le souffre douleur de la famille. Il n'a pas fréquenté l'école, ne sait ni lire, ni écrire et ne parle que le patois. C'est un "innocent sans malice", mais assez grossier, vif et coléreux. Un peu avant le 19 septembre, son père l'a prêté pour quelques jours à un fermier des environs pour remplacer son valet malade.

Françoise-Mélanie Mathieu a presque 15 ans. Elle est le quatrième enfant d'une famille indigente. Dès sa dixième année, elle est placée en service chez des paysans de la région. Elle ne passe au foyer paternel que les mois d'hiver. Elle est aussi analphabète. Frustrée d'affection et habituée à passer de longues journées seule avec ses troupeaux, elle a un caractère fermé.

Troupeau de vaches

Depuis quelques jours, les deux enfants se sont retrouvés dans les alpages en gardant les vaches de leurs maîtres. Ils s'entendent bien et, le 19 septembre, se donnent rendez-vous pour partir ensemble le matin, en conduisant chacun quatre vaches au Mont-sous-les-Baisses.

Maximin emmène en plus son chien et la chèvre de son père. Son maître fauche un pré non loin de l'endroit où les enfants gardent les bêtes. Connaissant l'étourderie de l'enfant, il préfère le surveiller de loin.

A midi, après avoir mangé un peu de pain et de fromage, Mélanie et Maximin s'endorment, couchés dans l'herbe près d'un ruisseau. A leur réveil, vers trois heures de l'après-midi, les enfants s'inquiètent de leurs bêtes, mais les retrouvent toutes un peu plus loin.

Apparition de la Vierge assise

En redescendant près des bêtes, Mélanie pousse un grand cri : elle voit une clarté semblable à un soleil.

Elle appelle Maximin et les enfants voient la clarté s'ouvrir et découvrent en son milieu la forme d'une femme assise, la tête entre les mains et les coudes sur les genoux.

Les enfants sont apeurés, mais la dame se lève et leur dit :


"Avancez mes enfants, n'ayez pas peur, je suis ici pour vous conter une grande nouvelle."

Vierge debout

La Dame, toute de lumière, porte sur la poitrine un crucifix, un marteau et des tenailles. Elle leur tint alors ce discours un peu étrange, d'abord en français, puis en patois de Corps :

"Si mon peuple ne veut pas se soumettre, je suis forcée de laisser aller le bras de mon Fils. Il est si lourd et si pesant que je ne puis plus le retenir. Depuis le temps que je souffre pour vous ! Si je veux que mon Fils ne vous abandonne pas, je suis chargée de le prier sans cesse pour vous  et vous autres, vous n'en faites pas cas ! Vous aurez beau prier, beau faire, jamais vous ne pourrez récompenser la peine que j'ai prise pour vous !
Je vous ai donné six jours pour travailler, je me suis réservé le septième et on ne veut pas me l'accorder. C'est ça qui appesantit tant le bras de mon Fils ! Ceux qui conduisent des charrettes ne savent pas jurer sans mettre le nom de mon Fils ! Ce sont les deux choses qui appesantissent tant le bras de mon Fils. Si la récolte se gâte, ce n'est rien qu'à cause de vous autres  je vous l'ai fait voir, l'année dernière, par les pommes de terre : vous n'en avez pas fait cas  c'est au contraire, quand vous en trouviez de gâtées, vous juriez, vous mettiez le nom de mon Fils. Elles vont continuer à pourrir et à Noël il n'y en aura plus."

Abbé Melin, curé de Corps

Au retour des enfants, Maximin raconte les évènements à son patron et Mélanie, plus tard, confirme les faits. Les deux maîtres, celui de Mélanie et celui de Maximin, envoient les enfants chez le vieux curé de la Salette Jacques Perrin, qui, en proie à la plus vive excitation, annonce aussitôt la nouvelle en chaire de vérité, comme c'était un dimanche. Ce vieux curé est remplacé par un autre Perrin, l'abbé Louis Perrin, dès le 28 septembre 1846.

Plus tard, l'affaire est montée en épingle par l'abbé Melin, curé de Corps (voir son portrait ci-dessus). Il prend de l'eau de la fontaine proche du lieu de l'apparition et fait courir le bruit qu'elle est miraculeuse. Il écrit plusieurs fois à l'évêque de Grenoble pour lui faire part de sa conviction que la Vierge est bien apparue à la Salette. La nouvelle se répand très rapidement et, à peine quelques jours après l'événement, des centaines de pélerins arrivent sur les lieux et des guérisons sont attestées. On observe même une pluie de boue rouge qu'on attribue à la malédiction annoncée par la Dame.

Mgr de Bruillard, évêque de Grenoble

Monseigneur de Bruillard, évêque de Grenoble, déjà octogénaire, est un peu dépassé par les événements et c'est seulement au mois de juillet 1847 qu'il rend une ordonnance pour ouvrir une enquête afin de savoir si la vierge Marie était réellement apparue aux deux bergers, en ayant soin, cependant de placer dans la commission une majorité de personnes favorables à la certification de l'apparition.
En effet, force est de constater que les églises se remplissent mieux qu'auparavant et que la ferveur devient de plus en plus importante dans la région.
Les curés en profitent d'ailleurs pour demander une aide financière à l'évêché, afin d'améliorer le confort du presbytère et de l'église. Cette enquête dure deux années et le rapport de 1848 conclut bien à l'existence du miracle de l'apparition.

Le chanoine Rousselot, ardent défenseur du miracle, écrit, dès 1849 un "Manuel du pèlerin à Notre-Dame de La Salette".
En 1851, il écrit à l'évêque : "Il conviendrait donc, Monseigneur, de terminer promptement, avec les gens de la Salette ; ils étaient déjà bien disposés, il s'agit de ne pas les laisser se refroidir, et de bien vite conclure."
C'est ce que fit l'évêque le 19 septembre 1851 en ratifiant le rapport d'enquête et en reconnaissant officiellement l'apparition.

Mademoiselle de la Merlière

Et pourtant, le doute s'est installé, y compris au sein des membres du clergé.

Il faut dire que tout se base sur une seule prétendue apparition et sur le seul témoignage de deux adolescents. Les propos de la Dame semblent assez étranges, ainsi que le fait qu'elle ait parlé le patois de Corps. Si on ajoute encore que ses prophéties n'ont pas été réalisées et que les prétendues "guérisons" semblent fort exagérées, il est assez logique que plusieurs personnes réagissent. Ainsi, l'abbé Déléon, ancien curé de Villeurbanne, publie un article intitulé "La Salette, vallée du mensonge.".
En septembre 1854, il met en évidence la supercherie, en affirmant qu'une demoiselle Constance Saint-Ferréol de La Merlière, ancienne religieuse de la Providence (voir illustration), s'était fait passer pour la vierge Marie auprès des enfants.
Un conducteur de diligence déclare que, juste à l'époque de l'apparition, il a amené à La Salette Mlle de La Merlière, connue dans tout le pays pour ses excentricités, qu'il l'a descendue au pied de la montagne et qu'elle lui a dit, avec une grande exaltation : "Je vais faire une action d'éclat; on parlera de moi dans la postérité."
Quelques jours après, la même demoiselle se montrait, revêtue du même costume qu'avait la Vierge apparue aux petits bergers, c'est-à-dire une robe jaune sur laquelle étaient brodés les instruments de la passion et un chapeau en pain de sucre. Ce costume a d'ailleurs été vu chez elle par une voisine. Par la suite, la demoiselle a perdu deux procès concernant ces accusations.

Maximin adulte

Malgré cela, la Vierge de la Salette est toujours vénérée et fait l'objet de pèlerinages.

En 1851, Mélanie prend l'habit sous le nom de Soeur Marie de la Croix, mais n'est pas admise à la profession de foi parce qu'elle est considérée comme "complètement folle".
Après plusieurs errances entre l'Angleterre, la France et l'Italie, elle écrit un texte autobiographique dans lequel elle explique qu'à l'âge de trois ans, elle avait joué avec le petit Jésus dans la forêt. Ce texte est considéré comme ayant été écrit par une hystérique et une mythomane.
Quant à Maximin ( voir illustration), il continue à blasphémer et à se montrer incapable d'apprendre et de travailler. Il avoue parfois que l'apparition était une supercherie et tombe dans l'oisiveté, l'errance et l'ivrognerie.

Quelles que soient les opinions, il est vrai que l'apparition de la Salette comporte toujours un nombre important d'interrogations et de contradictions. Une enquête trop tardive, menée à sens unique par certains membres du clergé qui voulaient y croire, engendre aisément des témoignages partiaux et à sens unique qui n'engagent pas à admettre la vérité de l'apparition sans se montrer fort critique.

Finalement, peut-on prêter foi au "miracle" de la Salette ?

Compte-tenu de l'évolution des événements après l'apparition de la "dame" à la Salette, il est permis en tout cas de se poser des questions concernant la véracité des témoignages des deux enfants.

Quoiqu'il en soit, partisans et opposants sont restés sur leurs positions. L'abbé Deleon a continué à marteler son scepticisme alors que les défenseurs du miracle démontaient tous ses arguments. Notamment, ils jugeaient impossible que la vieille demoiselle de la Merlière ait pu monter jusqu'au lieu de l'apparition et "s'élever dans les airs" pour disparaître ensuite.

Quant aux opposants au miracle, ils considéraient, comme le vicaire général Berthier, "qu'à force de multiplier les prodiges, on offensait la foi autant que le bon sens" ou encore que "ces ecclésiastiques (nb : les "défenseurs" au cours de l'enquête) estiment qu'il suffit qu'une affabulation soit généralement acceptée pour qu'on puisse admettre qu'elle soit fondée."

Bref, une opposition entre les deux camps qui n'a pas fait évoluer la connaissance exacte des faits.

En tout cas, cela n'a pas empêché la dévotion à Notre-Dame de la Salette

Pèlerinage à la Salette Le clergé continua à préconiser le miracle, et les pèlerins continuèrent à abonder et à se dire miraculés.

Même, le retentissement des débats opéra un redoublement de ferveur, par réaction, par besoin instinctif de protester contre les prétendus blasphèmes de l'incrédulité ou du simple esprit critique.

On construisit une basitique, flanquée de deux coprs de bâtiments et pouvant loger 600 personnes, et on organisa des pèlerinages, qui restent encore aujourd'hui fréquentés assidûment.

Et, plus d'un siècle après les événements, la ferveur reste intacte, jusqu'à Villers-sur-Semois

Non seulement, la chapelle y a été construite en 1946, mais plusieurs objets de culte sont témoins de la dévotion particulière pour cette Vierge :

Statue en bois polychromée Peinture sur le retable de l'autel latéral Vitrail de l'église Bannière de procession

  • une très belle statue de bois polychromée, qui malheureusement est cachée dans une armoire au jubé de l'église,
  • une peinture sur le retable de l'autel latéral de droite dans l'église,
  • un vitrail de l'église représentant les enfants et la Dame,
  • une bannière utilisée pour les processions à la chapelle.

Finalement, peu importe...

Que la Vierge soit réellement apparue aux deux enfants ou pas, le résultat est là : la dévotion est bien présente et les croyants pratiquent leur foi en la Vierge de la Salette.

Je serais enclin à conclure que la foi n'a pas besoin de miracle et de mystère. Le vrai miracle est la ferveur et l'amour de ceux qui y ont cru.

Terminons donc par la phrase de la fameuse demoiselle de la Merlière elle-même, en s'adressant au conducteur de la diligence qui l'avait emmenée au pied de la montagne et qui, plus tard, s'offusquait que l'on croie en une apparition de la Vierge :

"Permis à vous de ne rien croire ; mais laissez donc croire les autres ; cela fait du bien à la religion."

Bibliographie
  1. Stern, J. La Salette - Documents authentiques - dossier chronologique intégral - Volume 1 : septembre 1846 - début mars 1847. - 417p. - 1980 - ed. Desclée de Brouwer, Paris
  2. Stern, J. La Salette - Documents authentiques - dossier chronologique intégral - Volume 2 : fin mars 1847 - avril 1849. - 385p. - 1984 - Les éditions du Cerf, Paris
  3. Hallet, M. Les apparitions de la Vierge et la critique historique. - 422p. - 2015 - Edition électronique, Liège
  4. Larousse, P. La Salette-Fallavaux in Grand dictionnaire Larousse du XIXe siècle.
  5. La Salette-Fallavaux in Encyclopédie en ligne Imago-Mundi.